DRLe port militaire de Tartous en Syrie
La Russie est en train de déployer des navires de guerre à sa base en Syrie. Parmi eux, le porte-avions Amiral Kouznetsov, qui transporte des missiles de croisière. Le déploiement avait été planifié sans aucune relation avec les tensions actuelles en Syrie, mais il fait suite au mouvement américain pour stationner le George H.W. Bush, porte-avions de la force de frappe avec des navires de soutien en face de la Syrie. Les spéculations vont bon train au sujet d’une « intervention humanitaire » occidentale en Syrie. Les Nord-Américains et les Turcs ont demandé à leurs compatriotes de quitter la Syrie...La Ligue arabe s’entend avec l’Europe sur la Syrie.
La France, une fois de plus, prend la tête des opérations. Il est intéressant de voir que la Turquie a été invitée spécialement au sommet des ministres européens des Affaires étrangères à Bruxelles... Les mouvements semblent étonnamment similaires à ceux qui ont précédé l’intervention en Libye.
Le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères a déclaré, le 25 novembre, que « la situation des droits de l’homme dans un pays particulier peut certainement être une préoccupation internationale, mais les question de droits de l’homme ne sauraient en aucun cas être utilisées comme prétexte pour interférer dans les affaires internes des États, en Syrie aujourd’hui...Le peuple syrien doit décider de son futur, sans intervention extérieure...Nous n’accepterons en aucun cas un scénario d’intervention militaire en Syrie. »
Les conseillers militaires russes sont peut-être en train d’aider la Syrie à installer des missiles S-300, un gros risque pour les Occidentaux dans le cas où ils imposeraient une zone d’exclusivité aérienne, comme ils l’ont fait en Libye.
La grande question est de savoir s’il pourrait y avoir une confrontation entre les États-Unis et la Russie...Pour les premiers, un changement de régime en Syrie leur ouvre la voie, ensuite, vers le Hamas et le Hezbollah, ce qui isolerait l’Iran, un enjeu de taille. Pour la Russie, outre que la Syrie est une alliée de longue date, la perte de la base navale de Tartous serait un sérieux coup qui entamerait sa capacité à opérer dans la région méditerranéenne.
Une telle confrontation autour de la Syrie peut avoir des effets sur de nombreuses questions comme le dernier round afghan, le problème nucléaire iranien, les tensions Pakistan-États-Unis, etc.
Il est significatif que le Kremlin ait dépêché son ambassadeur à l’Otan, Dmitry Rogozin, à Pékin et Téhéran pour des consultations sur le système de défense antimissiles USA/OTAN. Jusqu’ici, la Russie s’est concentrée sur le système ABM comme problème bilatéral avec les États-Unis. Aujourd’hui, les intérêts communs sont étudiés avec la Chine et l’Iran. Les implications sont profondes pour la sécurité régionale en Asie centrale et du sud autant qu’en Extrême-Orient.
Pour preuve, la politique indienne « Act East » (qui consiste à s’implanter à l’est de ses frontières) avec, en particulier, le « dialogue trilatéral » qui réunit les États-Unis, l’Inde et le Japon, sont dans le viseur de la Russie autant que de la Chine.
La « période d’essai » de coopération entre la Russie et l’Inde semble évoluer vers une « zone de turbulence», du fait des nouvelles sympathies de l’Inde pour la stratégie américaine dans l’Asie-Pacifique. Le prochain sommet de Moscou avec le Premier ministre Manmohan Singh, devrait faire la lumière sur les lignes de fracture.
(Publié dans Politics, 28 novembre 2011)
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