mardi 15 mars 2011

Mgr Béchara RAHI, Nouveau Patriarche des Maronites - La situation des maronites aujourd'hui au Liban

Web Counter

http://www.diplogeostategies.blogspot.com/


Le synode des évêques maronites a élu l’actuel évêque de Byblos Béchara Rahi, Patriarche Maronite d’Antioche et de tout l’Orient.Il devient ainsi le 77 patriarche depuis St Jean-Maron(1er patriarche d’Antioche en 685).

Béchara Rahi est né le 25 février 1940 a été ordonné prêtre en 1967 pour devenir évêque en 1986.

Il succède ainsi au Patriarche Nasrallah Boutros Sfeir, qui avait présenté sa démission au Vatican, le 26 février dernier, indiquant avoir atteint la limite d’âge.

Mgr Béchara Rahi s’était notamment fait connaitre ses dernières années, dénonçant la division de la communauté chrétienne. « Au Liban, les chrétiens sont divisés au plan politique et confessionnel et personne n’a un projet acceptable par tous », avait-il déclaré, avant de déplorer que « cette division est causée par les conditions politiques actuelles, tant internes que régionales et internationales. »

« Il existe dans le monde arabe une forte division entre les sunnites et les chiites, apparente, sur le plan régional, dans la coalition, du côté sunnite, entre l’Arabie Saoudite, l’Égypte et la Jordanie, et du côté chiite entre l’Iran et la Syrie. Cette division s’est transformée en conflit sanglant entre les sunnites et les chiites en Irak. Sur le plan international, le conflit se situe entre les États-Unis et ses alliés en faveur des sunnites d’un côté, et l’Iran de l’autre à cause de ses ambitions régionales et de son programme nucléaire. Au Liban, c’est le conflit politique entre les chiites et les sunnites, où se situe la division des Chrétiens. Pour sauver le régime libanais et leur présence effective, une partie choisit l’alliance avec les sunnites, une autre avec les chiites et une troisième appelle à de bonnes relations avec les sunnites et les chiites et à ne pas se laisser entraîner dans la politique des axes régionaux et internationaux. »

Il poursuit en estimant que « le projet politique acceptable par tous consiste à parfaire l’État civil, dont les éléments se trouvent dans les « Constantes », la « Charte de l’action politique » et la Constitution. »

La principale mission du nouveau patriarche sera donc d’unifier les rangs des chrétiens du Liban, son prédécesseur ayant été accusé par certains partis dont le CPL de s’être discrédité en soutenant le 14 Mars.

Il s’était dernièrement fait connaitre dénonçant l’annulation par le gouvernement Saniora du jour férié accordé au lundi de Paques, contrastant avec le silence de l’ancien locataire de Bkerké. Certaines sources évoquent aussi les bonnes relations qu’entretiendrait le nouveau prélat avec le Vatican, relations qui auraient milité en sa faveur.

Pour rappel, Aujourd’hui l’Église maronite compte 23 diocèses et deux vicariats au Liban, en Syrie mais aussi dans le monde entier comme en Argentine ou en Australie. Le nombre de maronites est estimé à un peu plus de 3 millions.

source: lebnanews

Les Maronites au Liban 

Le quotidien "Le Monde des Religions", dans son numéro du 10 mars 2011, se penche sur la communauté maronite au Liban, son histoire mais surtout son rôle social et politique, par cette interview de Ray Mouawad, professeur à l'université libanaise américaine de Beyrouth et spécialiste des maronites. Propos recueillis par Matthieu Mégevand.



Quelle est la situation des maronites aujourd'hui au Liban tant au niveau social que politique?

Les lignes de force des maronites au Liban tenaient à trois composantes:

Premièrement, leur prépondérance dans le système politique libanais, au sein duquel la présidence de la République revenait toujours à un maronite, et jouissait de prérogatives étendues (à l’instar du président de la République française). Le président nommait le Premier ministre. Le chef de l’armée était toujours maronite. Toutefois après les accords de Taëf, la prépondérance des maronites dans la structure politique de l’État libanais a été largement écornée, en dépit du fait que le président de la République et le chef de l’armée sont toujours maronites. Le pouvoir a été transféré au gouvernement dont le chef, toujours sunnite, exerce effectivement le pouvoir.

Le deuxième point fort de la situation des maronites au Liban avait trait à leurs institutions éducatives (écoles et universités), hospitalières, et centres sociaux (enfance, vieillards, orphelinats), répandues dans tout le pays et très appréciées par les autres communautés du Liban. Ces institutions sont aux mains de l’Église, et des ordres monastiques maronites très puissants et très organisés.

Troisièmement, leur force résidait enfin dans leur classe moyenne très impliquée dans le secteur bancaire, dans celui de l’industrie et du commerce. Paysans pendant longtemps, les maronites se sont urbanisés à partir du XIXe siècle. Leur émigration à Beyrouth leur a donné accès à la ville et à sa dynamique économique. Avant la guerre libanaise (1975) la bourgeoisie maronite, et plus généralement chrétienne, a sans conteste formé l’élément moteur de la prospérité économique du Liban.

De ces trois composantes, seule la deuxième, leurs institutions, reste de nos jours le point fort de la présence des maronites au Liban. Leur pouvoir politique a beaucoup diminué après la fin de la guerre civile, et leur classe moyenne, celle de tout le Liban, peine à se reconstituer.

Comment les maronites vivent-ils le fait de ne plus être aujourd'hui dans une position démographique dominante?

Ils cherchent aujourd’hui à compenser leur infériorité démographique par l’intégration de leurs communautés émigrées dans le monde dans le système politique libanais. Les partis politiques maronites et les associations maronites internationales travaillent d’arrache-pied pour accorder la nationalité libanaise aux émigrés qui l’ont perdue, ou négligé de la maintenir pour leurs descendants. L’une des principales revendications des partis maronites aujourd’hui est d’accorder le droit de vote aux Libanais qui sont à l’étranger. Jusqu’à maintenant, les Libanais qui sont à l’étranger ne votent pas (cela est toutefois prévu pour les prochaines élections parlementaires).

Quelles sont les élites politiques représentatives des maronites?

La grande famille des Gemayel, et le parti Kataëb, représentent les maronites au sein du mouvement du 14 Mars. A leurs cotés on trouve les Forces libanaises, et leur chef, Samir Geagea. Dans l’autre camp, le 8 Mars, les maronites sont représentés par le parti du général Michel Aoun, et par Sleimane Frangié.

Comment est perçue l'alliance entre Michel Aoun et le Hezbollah?

Pour les partisans du général Aoun, cette alliance représente une garantie de survie pour les maronites et autres chrétiens du Liban, avec un parti de plus en plus puissant localement et sur le plan international. Pour les autres, l’alliance de Aoun avec le Hezbollah va à la longue réduire les maronites à un statut de "dhimmisation", dans la mesure où le vrai décideur est le Hezbollah, les maronites devenant un auxiliaire et une "communauté alibi". Le Hezbollah est par ailleurs perçu comme le principal vecteur d’un retour de l’influence syrienne au Liban. Le retournement de Michel Aoun qui avait gagné sa popularité en combattant cette influence syrienne, demeure pour beaucoup inexplicable, et sa popularité au sein des maronites en a grandement pâti.

Quels rapports entretiennent les maronites avec les autres communautés, et plus spécialement avec les chiites et les sunnites?

Ce rapport dépend du camp dans lequel se trouvent les maronites, 14 Mars (sunnites) ou 8 Mars (Hezbollah). Samir Geagea a fait d’énormes efforts pour effacer auprès des sunnites son passé de seigneur de la Guerre, tout comme les Kataëb, en maintenant tout de même la ligne nationaliste libanaise qu’ils ont toujours défendue. Le grand écueil du Liban était le problème palestinien, que ces deux partis ont combattu pendant la guerre civile en même temps que l’occupation syrienne.

Les sunnites ont beaucoup aidé à ce rapprochement aussi, surtout depuis leur engagement ferme auprès de l’armée libanaise contre les extrémistes (sunnites) de Nahr el-Bared. Saad Hariri a par ailleurs mené une politique très pro-chrétienne, et proclame constamment que la parité islamo-chrétienne sera toujours respectée au Liban, quelle que soit le nombre des chrétiens.

Les maronites du 8 Mars sont persuadés en retour que l’alliance maronito-sunnite scellée en 1943 est bien morte, et que les chiites ayant été persécutés comme les autres minorités en Orient, seront un partenaire bien plus conciliant avec les chrétiens que les sunnites. En général aujourd’hui au Liban, les maronites sont partagés à égalité entre les deux camps, qui sont de plus en plus polarisés.

Les maronites sont-ils très croyants, soudés comme le peuvent être les chiites du Hezbollah par la religion?

Oui, ils sont très croyants et pratiquants. Les églises sont pleines, et les vocations nombreuses. Ils n’ont cependant pas les mêmes réflexes de solidarité que les chiites du Hezbollah. Peut-être est-ce dû à leur culture chrétienne, qui les ouvre immanquablement à celle de l’Occident et à des valeurs individualistes et fondamentalement indépendantes, alors que la culture chiite est irrésistiblement attirée par l’Iran. Maronites et chiites obéissent, je crois, à deux logiques communautaires différentes.

Quel avenir envisagez-vous pour les maronites?

Ils ont été porteurs d’un projet politique exceptionnel au Moyen Orient, le Liban. Ils ont en gros constitué avec les musulmans un pays géré conjointement, ce qui aurait été impensable dans un autre pays arabe. S’ils ont perdu la guerre, les maronites tentent tout de même de sauver la mise avec un acharnement qui prouve qu’ils ne sont pas morts. Je crois que leur avenir dépend de la pérennité de leurs institutions au Liban et à l’étranger, qui comme toujours doivent être ouvertes à tous, chrétiens et musulmans. Ils doivent également éviter à tout prix un affrontement sunnite-chiite au Liban, et je pense qu’ils constitueront un élément liant, qui a tant manqué en Irak, entre les différentes communautés.

http://www.diplogeostrategies.blogspot.com/

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire