dimanche 25 août 2013
samedi 24 août 2013
SYRIE: Les scénarios d'intervention militaire
La présence de la US Navy en Méditerranée va être renforcée avec le déploiement d'un quatrième navire de guerre américain armé de missiles de croisières, en raison des derniers développements de la guerre civile syrienne, a annoncé vendredi 23 août un responsable du Pentagone. AFP PHOTO/US NAVY/CHAD R. ERDMANN
Zones tampon, zone d'exclusion aérienne, neutralisation des armes chimiques...
De la neutralisation de l'arsenal chimique de Bachar el-Assad à l'établissement d'une zone d'interdiction aérienne, les différents scénarios d'action militaire en Syrie comportent des conséquences et risques d'engrenage qui depuis deux ans ont dissuadé la communauté internationale d'intervenir.
A Washington comme à Paris, une intervention massive au sol est jugée hors de question.
+ L'établissement de zones tampon
Il s'agit de créer un sanctuaire, "vraisemblablement le long des frontières avec la Turquie et la Jordanie", pour faciliter la distribution d'aide humanitaire aux réfugiés et permettre à l'opposition de s'organiser et de s'entraîner, explique le plus haut gradé américain, le général Martin Dempsey, dans une lettre à un élu.
Cette option faciliterait la formation de l'opposition modérée par les Etats-Unis et d'autres pays, comme c'est déjà le cas en Jordanie.
Cela passe par "l'établissement d'une zone limitée d'exclusion aérienne" et "des milliers de troupes américaines au sol, même si elles sont stationnées hors de Syrie, pour soutenir ceux qui défendent physiquement ces zones", détaille le général Dempsey.
Le risque est de "laisser au régime de Bachar el-Assad le contrôle de l'essentiel du territoire", et de n'aider l'opposition qu'à s'assurer du contrôle de poches de territoire sans lui permettre de l'emporter, juge Anthony Cordesman, du Center for Strategic and International Studies (CSIS) à Washington.
Selon les informations recueillies par Isabelle Lasserre pour Le Figaro, les Américains formeraient discrètement depuis plusieurs mois, dans un camp d’entraînement installé à la frontière jordano-syrienne, des combattants de l’Armée syrienne libre (ASL) triés sur le volet. Leurs protégés auraient commencé à bousculer des bataillons syriens dans le sud du pays, en approchant de la capitale. Selon David Rigoulet-Roze, chercheur à l’Institut français d’analyse stratégique, cette pression militaire aurait été ressentie jusque dans la Ghouta (région dont l'opposition syrienne affirme qu'elle a été le théâtre d'un bombardement à l'arme chimique) et aurait été considérée comme une menace par Damas. En juillet dernier, le porte-parole du président Assad avait publiquement affirmé que le régime n’utiliserait pas d’armes chimiques en Syrie "sauf en cas d’agression extérieure". L’intrusion d’agents étrangers dans le sud du pays, par exemple...
Vendredi 23 août, un responsable jordanien a annoncé que les chefs d'état-major de plusieurs pays occidentaux et musulmans dont ceux des Etats-Unis et d'Arabie saoudite se réuniraient dans les prochains jours en Jordanie pour examiner les retombées du conflit en Syrie.
+ La zone d'exclusion aérienne
Cette option, proposée par de nombreux partisans d'une intervention, viserait à empêcher le régime d'utiliser ses avions et hélicoptères pour bombarder et ravitailler ses troupes.
Elle suppose de neutraliser les défenses aériennes syriennes, qui "au début de la guerre civile comptaient parmi les plus efficaces et denses au monde, sans doute juste après celles de la Corée du Nord et de la Russie", affirme l'US Air Force dans une étude qui les chiffre à "environ 650 sites anti-aériens".
"Les plus inquiétants abritent les SA-5 Gammon, qui ont une portée de 300 kilomètres et 30.000 mètres d'altitude", précise l'étude.
Ce scénario implique également de bombarder les aéroports et les infrastructures de soutien et requiert "des centaines" de bombardiers, avions ravitailleurs, de reconnaissance et de guerre électronique pour brouiller les radars ennemis, précise le chef d'état-major interarmées américain.
Rien que pour les frappes initiales, quelque 72 missiles de croisière seraient nécessaires pour mettre hors d'usage les principales bases aériennes du régime, selon une étude de l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW).
Pour Anthony Cordesman, cette option d'intervention suppose l'accès à des bases aériennes dans des pays proches de la Syrie et la participation des Britanniques, Français, Saoudiens, Emiratis et Qataris pour donner une légitimité internationale accrue face à l'opposition de la Russie et de la Chine.
Washington peut "absolument" mener cette opération, selon le général James Mattis, ex-patron du Centcom qui chapeaute les forces américaines au Moyen-Orient. "Mais les tueries se poursuivront" parce que l'essentiel des bombardements par le régime est le fait de l'artillerie au sol, a-t-il noté lors d'une intervention lors d'une conférence fin juillet.
Mais pour Anthony Cordesman, la zone d'exclusion aérienne devrait préparer le terrain à "une zone d'interdiction de mouvements": il s'agirait ensuite de bombarder les troupes du régime, comme cela avait le cas des forces libyennes en 2011.
De simples frappes à l'aide missiles de croisière pour ne pas s'exposer aux défenses aériennes syriennes prendraient du temps avant d'entraîner une "dégradation significative des moyens militaires du régime et une augmentation des désertions", note le général Dempsey dans sa lettre. Elles posent également le problème de possibles "représailles" et de dommages collatéraux dans la population.
+ La neutralisation des armes chimiques syriennes
Avec cette option, il s'agit de "détruire une partie" des centaines de tonnes de sarin, gaz moutarde et gaz VX possédé par le régime syrien, "d'interdire leur transport" ou encore de "s'emparer et sécuriser" certaines sites impliqués dans le programme d'armes chimiques syrien, selon le plus haut gradé américain.
"Au minimum, cette option implique une zone d'exclusion aérienne, des frappes aériennes et de missiles" ainsi que "des milliers de forces spéciales et autres troupes au sol" pour donner l'assaut aux sites et les sécuriser.
"Le résultat serait le contrôle d'une partie, mais pas de toutes les armes chimiques" et pourrait "faciliter l'accès des extrémistes" aux sites non contrôlés, craint le général Dempsey, réticent à toute intervention.
+ Les frappes aérienne au Kosovo, possible précédent pour Washington
Les autorités américaines pourraient s'inspirer des frappes aériennes lancées au dessus du Kosovo à la fin des années 1990 pour déclencher une action similaire en Syrie, sans mandat de l'ONU, a rapporté le New York Times samedi 24 août.
Lors du conflit du Kosovo en 1998-1999, la Russie a soutenu le régime yougoslave de Slobodan Milosevic, accusé d'atrocités envers les civils dans cette province serbe. Dans la mesure où la Russie opposait son veto au Conseil de sécurité de l'ONU, il était impossible de parvenir à une résolution autorisant le recours à la force contre la République yougoslave.
En mars 1999, l'OTAN a déclenché des frappes sur les forces serbes stationnées au Kosovo, arguant que les violences commises par elles constituaient une situation d'urgence humanitaire. L'attaque a duré 78 jours.
Un an après avoir averti la Syrie que l'utilisation d'armes chimiques dans le conflit serait franchir la "ligne rouge", l'administration du président Barack obama cherche les moyens de répondre au régime de Bachar el-Assad si un recours effectif à ces armes était prouvé.
Aujourd'hui, comme alors, la Russie s'oppose à une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU autorisant le recours à la force contre la Syrie.
"Ce serait aller trop loin que de dire que nous sommes en train d'élaborer une justification légale à une action militaire, dans la mesure où le président n'a pris aucune décision" a confié au New York Times un haut responsable de l'administration, sous couvert d'anonymat. "Mais, bien évidemment, le Kosovo est un précédent pour une situation qui peut paraître similaire" a-t-il ajouté.
Le débat autour du Kosovo a été l'un des sujets examinés à propos du conflit syrien, a expliqué la même source. Les conséquences possibles d'un lancement de frappes contre la Syrie sur les pays de la région comme le Liban, la Jordanie, la Turquie ou l'Egypte, sont également étudiées, a-t-il précisé.
Dans un entretien sur CNN, le président Obama a affirmé que les accusations de recours aux armes chimiques par le régime syrien représentaient "un événement important", "très troublant" et "profondément inquiétant".
Le président américain a indiqué que la question de savoir si une intervention militaire des Etats-Unis contre un autre pays sans mandat du Conseil de sécurité de l'ONU enfreindrait les règles internationales était étudiée.
Dans la nuit du vendredi au samedi, le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel, a annoncé le déploiement de moyens militaires afin de fournir des "options" au président si Barack obama devait donner l'ordre d'une intervention en Syrie.
Vendredi, un responsable du Pentagone a indiqué que l'US Navy va renforcer sa présence en Méditerranée avec un quatrième navire de guerre américain armé de missiles de croisières, en raison des derniers développements de la guerre civile syrienne. Le responsable a pris soin de souligner que la marine américaine n'avait reçu aucun ordre en vue d'éventuelles opérations militaires en Syrie.
source: AFP
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